Bien plus qu’un réseau

C’est à travers le parcours d’Antoine Zaatini que nous découvrons le projet Biocoop. Il le rencontre en 2015 en passant devant le chantier de Laroque, pose un CV, passe les entretiens, est embauché, devient référent de rayons pour les produits frais, ultrafrais, le service arrière, la fromagerie, la boulangerie. Il prend la responsabilité du magasin de Saint Hippolyte du Fort La fourmi et la cigale, de 2017 à 2018. Il est embauché sur le site du Vigan en 2019. Un parcours inattendu.
Je viens du théâtre, de l’écriture, de la traduction. J’ai fait une école de formation d’acteur. Je suis franco-libanais. Je suis attaché à ma langue maternelle. Je l’écris, je la traduis dans les deux sens.
De ces 7 années passées dans le réseau Biocoop, Antoine affirme que l’essentiel n’est pas dans la maîtrise des différentes tâches techniques. L’humain est vraiment au centre de cette structure. Pour lui et la plupart de ses collègues : Une fois que tu as bossé dans le réseau, dans n’importe quel magasin, tu n’as plus envie de bosser ailleurs.

Focus. À Laroque, Antoine Zaatini découvre pour la première fois le projet du réseau Biocoop qui est une grande coopérative avec 700 sites. Il y a quelque chose qui n’est pas visible à première vue, c’est une dynamique engagée, militante et politique.
Les statuts des différents sites sont divers. Soleil Levain à Alès et La fourmi et la Cigale à Saint Hippo sont les 2 seules associations du réseau. Le magasin de Laroque est une SCIC — Société coopérative d’intérêt collectif. Il y aussi des SARL. Les décisions sont prises ensemble avec un directoire, un conseil de surveillance, un collège des producteurs, un des consommateurs, un des partenaires. La voix de tout le monde est respectée, tout le monde est écouté, poursuit Antoine.
Il devint pour la première fois responsable magasin à Saint Hippo. L’équipe compte 10 personnes. Son rôle est de relancer le site, d’avoir une croissance forte, de prendre 30% de plus. Il remplit et dépasse l’objectif. C’était pour moi une responsabilité énorme. Je donnais énormément d’énergie. Antoine préfère rejoindre l’équipe du site du Vigan tout en restant dans le réseau Biocoop. Ce n’est pas juste un réseau de distribution de produits biologiques. C’est vraiment une attention à l’environnement, à la nature. C’est un soutien direct aux producteurs. C’est le montage de filières pérennes, insiste Antoine. Chaque consommateur devient un acteur dans son acte d’achat. Quand il fait le choix de venir à la Biocoop, c’est un acte politique fort et derrière, il y a toute une chaîne qui pro te de son choix. D’où les expressions de “consommaction” et de “consommacteurs”. Chaque produit, sur n’importe quelle étagère, sur n’importe quel rayon, est vraiment choisi sur des critères stricts et contrôlés.
Le réseau travaille sur le maillage du terrain. C’est une stratégie bien réfléchie. Avoir le plus possible de magasins qui re- lient les consommateurs aux producteurs, aux transformateurs, aux fournisseurs. La production est nommée locale si elle n’est pas éloignée de plus de 150 kms du lieu de vente. C’est la définition du circuit court — source ADEME.

Il y a des dynamiques de soutien pour les producteurs, pour les aider à s’installer. Nous travaillons en priorité avec les locaux. Pour les différents produits qui ne se trouvent pas dans les circuits courts, le magasin se dirige vers leur centrale d’achats ou plateforme Biocoop. Il y en a 4. Les 3 magasins du territoire sont rattachés à celle de Noves (13) pour le sud-est.
Chaque magasin est autonome. Il reste lié au réseau par le cahier des charges et par la charte que nous avons signée définissant nos droits et nos responsabilités vis à vis de tous les acteurs du réseau Biocoop. Lorsqu’un magasin Biocoop référence un producteur, nous le rencontrons, nous discutons ensemble. Un dossier est établi, adressé à la commission qui s’occupe de la production locale. Une fois référencé comme producteur local associé à un magasin, s’ouvrent les portes de tous les sites autour. Il y est automatiquement référencé. Nous constatons avec la pratique que c’est possible de rêver de faire le commerce autrement et que cela soit rentable. Tous les projets de soutien à la production local, à long terme sont bénéfiques pour tout le monde. Le consommateur constate que ce qu’il cherche vient d’à côté de chez lui. Le magasin gagne un fournisseur, un producteur.

Biocoop facilite les démarches de conversion au bio qui dure 2 à 3 ans. Il est difficile pour un agriculteur d’être rentable pendant cette période. Antoine précise : À partir de la deuxième année, le magasin peut vendre des produits en conversion avec un étiquetage particulier. Il est bien lisible pour le consommateur. Ces produits-là si vous les achetez, vous soutenez ce producteur. Il est dans la dernière ligne droite pour avoir le label bio.

Dans les réunions régionales des Biocoop, les sites des Cévennes sont perçus d’un autre œil. Ici nous avons du caractère, que ce soient les magasins, les consommateurs, les projets et la façon dont ils sont montés. C’est une attitude de militant brut qui ne fait pas de concessions, qui veut que le commerce ressemble à un idéal. “OK, vous avez ou- vert cette Biocoop mais vous ne pouvez pas nous mettre n’importe quoi dans les rayons.” À St Hippo c’est sûr. J’ai retrouvé pratiquement la même chose à Laroque et au Vigan avec une clientèle exigeante qui ne laisse rien passer.
La réouverture du magasin du Vigan est programmée pour le 8 juillet dans un lieu provisoire le temps de démolir là-bas et de reconstruire. L’équipe est dans les temps. Ce sera un beau magasin. Du coup dans le réseau, Antoine a fait 3 ouvertures ou réouvertures de magasins Biocoop. Antoine conclut : Le projet du réseau Biocoop a marqué profondément nombre de salariés, de producteurs, de consommateurs, de partenaires. Pour moi, en tant que salarié du réseau, je me sens respecté et écouté et je peux penser librement.
B.C

Le Marché, un dossier reporté

Consacrer un Porte-Voies à l’alimentation impose de parler du marché de Ganges tant il draine une population conséquente.
Mais il nous manque des informations et des documents importants. La Mairie vient de nous transmettre la dernière modification du règlement intérieur du marché. Le règlement complet a été demandé il y a plus d’un mois.

Le marché est également lié aux projets d’urbanisme dans le centre-ville de Ganges incluant la rénovation des Halles, la revitalisation du centre- ville de Ganges. Pour être sûr d’être complet, le comité de rédaction du Porte-Voies intégrera ce dossier dans le numéro 3 consacré à l’urbanisme.

Les jeunes et l’alimentation

Un simple exemple pour que nous battions en brèche nos idées reçues. Nous ne voulions pas faire un micro-trottoir auquel on fait dire ce que l’on veut. Simplement entendre que nous avons des préoccupations et des fonctionnements alimentaires proches.
Carlo : Je m’appelle Carlo Fertard. J’ai 14 ans. J’habite à Ganges et à Sumène et mes parents sont séparés. Je suis au collège de Ganges.
LPV : Alors, il y a trois repas dans la journée. Selon les personnes c’est vécu très différemment. Comment ça se passe pour toi du petit déjeuner au repas du soir ?
Carlo : Le matin, je me lève. En général, je mange. Mais ça m’arrive de ne pas manger parce que je me suis levé tard et du coup, on va manger le déjeuner, donc j’attends. Ou juste parce que je n’ai pas faim, je n’ai pas envie de manger. Mais sinon, en général, il y a trois repas. Après, c’est souvent des heures très différentes. Par exemple, le déjeuner, ça varie entre 11 heures et 15 heures. Après, le repas du soir, on ne sait jamais, c’est aléatoire.
LPV : Quels sont les aliments, les repas que tu affectionnes ?
Carlo : Je ne vais pas être super original parce que moi, je mange ce que tout le monde aime. J’aime les frites, les pâtes et tout. Mais je mange énormément de légumes, j’en mange beaucoup et j’aime ça. C’est bon. Il y a plein de plats différents. Il faut goûter à tout.

LPV : Quand il y a un aliment ou un plat que tu ne connais pas, comment réagis-tu ?
Carlo : Ben, ça dépend. Si dans les plats, il y a des aliments que j’ai déjà goûtés et que je n’aime pas forcément, du coup, je me dis que si je goûte, je ne vais pas aimer. Ça servira à rien. Mais si c’est vraiment nouveau, s’il n’y a rien que je connais dedans, je vais essayer de le manger. Je vais goûter pour voir. J’ai découvert beaucoup de plats japonais qui sont très bons.

LPV : Tu manges de temps en temps à la cantine ? C’est comment ?
Carlo : Tous les jours. C’est pas ouf, c’est pas super bon. Parfois, c’est bon, mais souvent, ils essayent de faire des plats qui peuvent plaire à tout le monde. Et je comprends. Sauf que moi, souvent je n’aime pas ces plats. Je n’aime pas les ingrédients. Parfois, ils n’ont pas les mêmes goûts que d’habitude. Ce ne sont pas des sous-marques. Ce sont des aliments différents qu’ils utilisent pour les mêmes plats. Il y a moins de saveurs. C’est bizarre…
LPV : Est-ce que tu aimes faire la cuisine ?
Carlo : Pas du tout. Jamais. J’en fais quand je suis seul et que je suis obligé de manger. Mais je n’aime pas du tout faire la cuisine.
LPV : Quels sont les plats que tu affectionnes particulièrement ?
Carlo : J’aime beaucoup les pâtes bolognaises. Et puis le riz au jambon. C’est très bon. Je mange rarement des pizzas, des hamburgers et autres parce que je n’aime pas du tout le fromage. Je n’en mange pas du tout. Je suis intolérant. Il n’y a pas beau- coup d’aliments que je ne mange pas. Souvent, c’est juste parce que je n’aime pas. Les carottes, je n’aime pas ça. Non, il n’y a pas vraiment d’aliments que je ne mange pas du tout. J’aime bien tout.
LPV : Est-ce que tu aimes partager souvent des repas avec des amis, des copains ?
Carlo : Oui. J’aime bien l’ambiance quand on mange avec des amis. En fait, comme je mange à la cantine, je mange très souvent avec les amis. Donc, c’est devenu un repas comme les autres pour moi.
LPV : Est-ce qu’il y a un plat que tu aimerais sa- voir faire ?
Carlo : Les râmen. Je n’en ai jamais mangé de ma vie, mais ça a l’air délicieux et j’aimerais beaucoup savoir en faire. C’est des nouilles dans une soupe.

Propos recueillis par B.C.

Photographies, Nathalie Crubézy

Diplômée de l’École Nationale Supérieure Louis Lumière en 2000, elle partage son activité entre des projets photographiques personnels et des travaux de commandes (associations, institutions, etc). Depuis 2004, elle est membre du Collectif à-vif (s) qui regroupe des photographes et rédacteurs indépendants (Paris / Marseille / Ganges).

Contact: 0611513629
www.a-vifs.org

Élu.e.s de l’opposition

ÀGanges, depuis les dernières élections municipales, les élu.e.s d’opposition revendiquent leur statut d’opposants et entendent bien participer à la vie municipale, comme les résultats les y incitent. C’est sans compter sur la volonté exprimée de nous empêcher d’y participer activement. Quelques rappels : à Ganges comme ailleurs, les abstentions furent nombreuses. Sur 2837 inscrit.e.s, 1511 personnes ne se sont pas rendues aux urnes. Michel Fratissier, avec sa liste Ensemble, Ganges plus fort, a obtenu au premier tour 56,41% des voix, soit 730 votes ; la liste conduite par Marc Bertrand Objectif Ganges a rassemblé 297 votes, et Un autre Ganges est possible, liste collégiale, a comptabilisé 267 votes. Malgré les 43,58% pour les 2 listes d’opposition, la répartition est de 22 élu.e.s pour la majorité et de 5 élu.e.s pour l’opposition. C’est la prime au sortant. Faisons avec.

25% des inscrits

Ces résultats soulignent le peu de représentativité de la majorité actuelle, puisque les 730 voix représentent à peine plus de 25% des inscrits. Le combat n’est pas d’appeler de nos vœux une autre répartition, c’est de réfléchir à la participation d’une opposition dans une commune où le maire cherche à lui imposer le service minimum. Quelle place est faite aux élu.e.s de l’opposition ? Quelle participation à la gestion de la ville est possible, comme la loi cherche à le garantir ?

Ganges a officiellement des élus d’opposition
Lors du conseil municipal du mois de juin, nous nous sommes présenté.e.s et avons insisté sur notre conception de l’opposition. Contrairement au maire qui, lors de ses vœux de 2020, exprimait que « toutes les décisions du conseil municipal étaient prises à l’unanimité », nous, membres de l’Association Nationale des Élus Locaux d’Opposition, affirmons notre attachement aux débats, à la contradiction. Pas question de nous fondre dans la majorité comme cela a été fait lors du précédent mandat. Nous concluons en soulignant que le dissensus est un critère fort de la démocratie.

Conquérir l’espace pour la communication des élu.e.s de l’opposition

Le fonctionnement du conseil municipal est régi par un règlement intérieur. Il est désormais obligatoire. Ce règlement intérieur organise les prises de paroles, la consultation des documents associés à l’ordre du jour, les espaces de communication accordés à l’opposition, la tenue des commissions… La loi garantit désormais l’expression des oppositions au sein d’un conseil. Nous avons obtenu un premier espace dans la revue municipale Le Lien, nous attendons la définition d’un espace équivalent sur le site Internet de la Mairie. Cette conquête de l’espace débouchera sur une place sur les affichages municipaux, sur un temps d’accueil périodique du public par les élus d’opposition dans un local municipal.

Une consultation de documents difficile

Pour perturber l’expression de l’opposition, le maire, en restant dans la légalité, rend notre participation difficile. L’ordre du jour du conseil à venir est envoyé au dernier moment, soit 6 jours avant. Peu de possibilités pour consulter les documents associés aux décisions à voter lors du conseil. Chaque point de l’ordre du jour est discuté entre élu.e.s de la majorité lors de “réunions de travail”. Les conseils municipaux ressemblent à des chambres d’enregistrement. Les débats sont absents. Les élu.e.s de la majorité prennent la parole lorsqu’un point de l’ordre du jour les concerne.

Interdit de commissions

L’État impose aux maires la présence d’élu.e.s d’opposition dans les différentes commissions organisées par le règlement intérieur, pour garantir le débat démocratique dans les communes. Lors du conseil municipal de décembre 2020, au moment des questions posées par les élu.e.s d’opposition, Michel Fratissier a affirmé son refus de notre présence dans les commissions. Pour nous en empêcher, il les a rebaptisées “réunions de travail”. Ainsi, le maire n’est plus dans l’obligation de nous faire participer.
Alors que le recentrage démocratique de la communauté de communes, dont Michel Fratissier est le président, est unanimement constaté et salué par l’ensemble des maires de la comcom, le maire de Ganges écarte l’opposition de la gestion de la ville. Pour rappel : la liste Un Autre Ganges est possible a axé sa campagne sur la participation de la population au devenir de sa ville.

Une justification impossible

Les élections de 2020 à Ganges ont montré un ensemble de thèmes souffrant de l’absence de concertation avec la population et nécessitant des débats. Où en sommes-nous du Trou des halles ? La démolition de l’îlot Charles Benoît, fruit d’une concertation ? Et la clinique ? Et la rénovation des halles ? Quid des commissions extramunicipales ? Consulté.e.s, vous êtes sûr.e.s ? Vous n’êtes pas au courant ? Savez-vous que l’Association Collectif Ganges Solidarités soutenue par la Fondation de France, a distribué 9 tonnes de denrées alimentaires pendant le 1er confinement ? Elle ne semble pourtant pas exister pour la mairie.

Une opposition force de propositions

L’exclusion de l’opposition est d’autant plus incompréhensible que cette dernière cherche constamment à être constructive. Lors du conseil municipal du 24 septembre 2020, madame Vincent a présenté un projet de jardins potagers municipaux, pour que la Ville puisse se l’approprier et faciliter sa réalisation. Véritable dynamique citoyenne à l’œuvre partout dans le monde, ces projets renforcent le Vivre ensemble, initient aux circuits courts, développent des savoir-faire, enrichissent nos sensibilités aux saveurs de notre alimentation… et il sont peu onéreux. Cet exemple pour souligner les objectifs de notre présence. C’est avant tout pour faire aboutir de tels projets, qu’ils soient issus d’idées de la mairie ou de dossiers sur lesquels nous avons déjà travaillés. Nous écarter, c’est nier la pluralité de la population. C’est s’ériger en maître et gouverner pour seulement une partie des citoyens de Ganges.

Ne rien lâcher

Nous avons une toute autre approche du fonctionnement d’un conseil municipal et de la gestion d’une commune. Constater le peu de place et d’expression qui nous est accordé, puis abdiquer, serait une offense à tous ceux et toutes celles qui aspirent à une autre ville de Ganges.
Nous resterons membres actifs du conseil municipal. Nous rappellerons les nécessités et les exigences de la consultation de la population. Nous nous opposerons à chaque fois que les décisions n’en tiendront pas compte. Nous porterons les projets comme autant de promesses pour la ville et sa population.
Le conseil municipal est un lieu du débat. Accueillir le dissensus permet des prises de décisions en conscience et associe l’ensemble des habitant.e.s à la gestion de la Ville.
B.C.