Autonomie alimentaire, un sujet pour la Communauté des Communes

Trente mille semi-remorques par jour traversent notre pays, chargés de produits agricoles et denrées alimentaires. Notre nourriture circule sur des centaines, voire des milliers de km avant d’arriver dans notre assiette.
L’alimentation n’est plus un secteur économique autonome, capable de produire, transformer et distribuer la nourriture localement, c’est un ensemble de maillons interdépendants, souvent très éloignés géographiquement. La raréfaction du pétrole à court terme remet en question toute l’organisation du système. Mais à l’échelle de notre territoire, sommes-nous autonomes ?
Lucas Faidherbe, maire de Saint Julien de la Nef et président de la Commission développement durable de la Communauté des Communes Gangeoises et Suménoises, explique : « L’autonomie alimentaire à base agricole locale est un peu une utopie. Historiquement, nous avons été autonomes, mais nous n’étions pas gros ! Et il fallait aimer les châtaignes ! On était esclave de sa terre et on mangeait peu. Notre période incertaine crée un regain d’intérêt pour le jardinage. Mais produire la consommation des 13 000 habitants de la Comcom est impossible actuellement. Il y a certes des surfaces disponibles, mais remettre en culture toutes les terres agricoles serait très difficile, et les candidats peu nombreux. Pommes de terre, oignons, pommes, châtaignes, moutons, chèvres, fromages, vin, maraîchage… voici ce qui existe sur la communauté de communes. Mais les oignons par exemple s’exportent à 98%. Là nous importons la plupart de ce que nous mangeons. À nous de préserver notre capacité à nous nourrir : produire plus ici et vendre sur place.

Localement nous tendons vers une agriculture non productiviste ni chimique : faire du bio, de la qualité. Pour cela des savoir-faire s’inventent, agroforesterie, permaculture… »
Les élus sont conscients qu’il faut favoriser agriculture locale et circuits courts pour une agriculture de qualité, aussi peu industrielle et polluante que possible. Et permettre aux jeunes de s’installer. Ici seules de petites exploitations sont possibles, si les produits sont bien valorisés par des prix assez hauts. Ce n’est pas un métier facile, mais les demandes d’installation existent.
Le premier obstacle est l’accès au foncier. Les baux ruraux contraignants (beaucoup d’obstacles à leur résiliation ) et de faibles loyers agricoles incitent les gens à ne pas louer leur terre. D’autres formules de contrat rassureraient les propriétaires et aideraient la mise en culture de toutes les terres. Quelle solution ? Acheter des terres pour les mettre à disposition d’agriculteurs.
La concurrence urbanisme/agriculture crée une tension : elle doit être réglée par des Plans Locaux d’Urbanisme, mais ce n’est pas simple. À la vente, 80 € le m2 de terre constructible, contre 2 € en agricole ! Il faudrait au moins garder les terres de jardins, les meilleures… mais les permis de construire ont souvent été accordés dans le passé, dans la continuité du bâti existant, justement dans les jardins ! Moins cher, plus pratique.
En 2021, avec le projet de loi Climat et résilience, l’État veut lutter contre l’artificialisation des sols pour la protection des écosystèmes et, en adaptant les règles d’urbanisme, diviser par 2 le rythme de cette artificialisation.

A.V.

À la Bougeotte, l’alimentation est créatrice de lien

Fruit joyeux de la rencontre entre une travailleuse sociale et une psychomotricienne, l’association PACAP (Pouvoir d’Agir en Cévennes par des Actions de Proximité) créée en janvier 2020, nous reçoit place Fabre d’Olivet, à Ganges. L’association porte tout un ensemble de projets dont la valeur de base est la création de liens. Pacap veut faire bouger notre corps, bouger nos habitudes alimentaires, nous faire bouger vers les autres !
La création du snack végétarien permet à l’association d’asseoir son autonomie financière, et donc ses orientations, mais elle obéit à des motifs plus profonds.Tout est fait pour proposer des menus de qualité à tout petit prix : choix du végétarisme, volonté de cuisiner des légumes biologiques, partenariat avec des producteurs et productrices locaux — une productrice de fleurs comestibles par exemple —, embauche de Maty, première salariée de l’association, intervention depuis le début de la diététicienne Anne Guichard. La dimension solidaire n’est pas oubliée et des repas sont distribués gratuitement, grâce à la « boîte repas suspendus » et aux dons en fin de service pour lutter contre le gaspillage.
Emmanuelle Lapeyronie et Véronique
Linck : Le projet de la Bougeotte est de renforcer les capacités cognitives et motrices des petits comme des grands. Une mauvaise alimentation (trop de sucre et trop d’aliments transformés consommés chaque jour) a une incidence directe sur le développement des enfants, sur leur com- portement.

Développer des capacités nouvelles est très di cile si on se sent mal avec son propre corps. Sur notre territoire a été repéré un vrai problème concernant l ’alimentation, et ses consé- quences directes sur les apprentissages : difficulté de concentration et surexcitation par exemple après un goûter trop sucré.
Il ne s’agit pas de stigmatiser les parents, mais de les aider à découvrir les bienfaits d’une alimentation plus équilibrée. D’où l’importance de l’éducation populaire autour de l’alimentation. Transmettre des informa- tions, attiser la curiosité des enfants et de leur famille vis-à-vis de leur environnement, c’est le projet de la Potageotte. Avec l’équipe des jardiniers de la ville, l’association des habitants de la Place Fabre d’Olivet « Le grand platane » et Pacap organisent des rencontres. Une fois par mois, une trentaine d’enfants participent au travail des jardiniers sur la place et cultivent eux-mêmes des plantes aromatiques.
Ateliers autour de la graine, réalisation de pancartes d’information, émission de radio, création de jeux autour des plantes : 25 familles étaient inscrites sur 4 ateliers pendant les vacances de février dernier. Transmission de connaissances.
Conscience du travail de l’autre. Création de lien toujours… Bravo Pacap !
A.V.

Potagers Partagés

« Mais non, ce n’est pas l’année du Covid et la rumeur de manque de nourriture dans les magasins qui nous ont poussés à commencer un potager… c’était il y a déjà 8 ans. Sur une petite parcelle seulement, et puis c’est devenu une passion ! » « Oh moi, ma famille a toujours cultivé son jardin, donc tu comprends pourquoi mes tomates, je sais comment les tuteurer… » « On a pris ce terrain avec des copains, mais on n’y connaît rien du tout, et ça n’est pas évident le jardinage. Mais on va apprendre et on se marre bien en tous les cas. Première salade, on est très fiers et on va se la manger ensemble ! »
L’autonomie alimentaire préoccupe partout en France et dans le monde, et cette année 2021 a vu beaucoup de jardiniers amateurs se lancer dans l’aventure potagère. Au départ, on rêve indépendance alimentaire. Mais les jardins potagers ne fourniront pas actuellement la nourriture pour tout le monde, ni sur toute l’année. Entre problèmes de climat, inondations, maladies et attaques d’insectes, visites des sangliers, des taupes ou des doryphores, et le temps qui manque pour se consacrer vraiment au jardin, il n’est pas simple d’avoir une production suffisante. Les étés deviennent par exemple si chauds que les fleurs de tomate font peu de fruits en juillet et il faut attendre août ou même septembre pour avoir enfin de bonnes récoltes.
Si l’exigence d’une récolte abondante occasionne traitements chimiques, désherbants et engrais de synthèse à tout va… on mangera des légumes de qualité très médiocre, et on abimera le sol des jardins sur le long terme.

Reproduire tous les défauts de l’agriculture industrielle à l’échelle d’un jardin individuel ou familial, quel intérêt ?
Des jardins partagés se développent dans les zones de potagers mais aussi en pleine ville, îlots de résistance à la bétonisation. Ce qui est proposé est simple : appliquer les principes de base des jardins familiaux — convivialité, courtoisie, solidarité, entraide, respect des autres et de l’environnement —, utiliser des produits phytosanitaires d’origine biologique, appliquer des méthodes d’économie d’eau… Chercher les solutions en cas de pollution des terres. Cela apporte à la fois plus de chance de manger des légumes car même si les escargots ont pillé mon repiquage de salades, ou si j’ai raté le semis de carottes cette année, j’aurai des chances d’en avoir tout de même, parce que cela aura mieux réussi dans une autre parcelle. De même si le savoir-faire me fait défaut, une autre personne pourra m’aider, et nous chercherons ensemble la solution. Enfin si je peine à la tâche du désherbage par exemple, plusieurs viendront à ma rescousse et le travail se fera de façon efficace et joyeuse… à charge de revanche.
C’est toute une philosophie à retrouver : non plus la concurrence et l’individualisme, mais le soutien de chacun.e pour les autres.
Partages solidaires, échanges de connaissances et d’outils, chantiers collectifs, convivialité… tout cela participe d’une denrée qui nous est indispensable : le lien social. Cultiver ce lien nourrit nos vies pour le présent et nous permettra d’inventer les perspectives originales pour le dépassement des crises du futur.

A.V.

Sarah Patroni

Ces tableaux ont été réalisés en octobre dernier pour une exposition collective au musée Monet de Fraisselines dans la Creuse, à l’occasion des 100 ans de la mort de Modigliani, mais ils parlent également de la période actuelle.

J’ai peint le grand tableau avec les oiseaux — qui m’ont toujours semblé les animaux les plus libres qui soient — pour l’exposition NISA ( « humaine » en arabe), pour soutenir un projet avec des femmes au Soudan. Il est si important que les femmes sortent de l’ombre… J’ai travaillé avec Mâya Defay du groupe Epilexique, qui a écrit des textes féministes.

L’association Brainwash dont je fais partie s’occupe depuis deux ans et demi d’un projet dans la ville de Lalibela, en Éthiopie, avec des femmes et des enfants.

Contact : Sonia 06 99 37 93 52S
Site web : http://sarahpatroni.free.fr/

 

Rencontre avec les élu.e.s de la minorité de Sumène

Marie-Christine Calais, Pascale Castanier, Richard Leprovost, Tania Mercereau, vous étiez élu.e.s de la majorité municipale dans la mandature précédente. Actuellement vous êtes élu.e.s de la minorité, qu’en est-il de la liberté d’expression pour vous au sein de la vie municipale suménoise ?
Il a fallu faire appel à la Sous-Préfecture pour obtenir l’espace d’expression qui nous est légalement dû (une page sur les 20 du bulletin municipal). Il semblerait que les élu.e.s majoritaires envisagent maintenant de nous attribuer seulement une demi-page. La nouvelle équipe édite «La lettre suménoise», bimestrielle, considérée par le maire comme «seulement de l’information», donc pas d’espace pour la minorité. Cette lettre affiche, hélas, une position partisane. Nous y sommes accusé.e.s de «fausses rumeurs, de gesticulations stériles», de «diviser et cliver»… C’est dommageable pour le statut d’élu.e.s de lire cela. Être la cible d’une hargne à cause de critiques sur l’action de la majorité est une atteinte à la démocratie, même si c’est à l’échelle locale.
Sur le site internet de la commune nous avons droit à un «onglet» consacré à la parole de la minorité, mais… consacré aussi à la réponse de la majorité ! Est-il juste que nos différends s’étalent sur le site facilement accessible à qui voudrait venir s’installer à Sumène?
Dans Sumène, 5 panneaux ouverts à tout le monde ont été installés par l’équipe précédente, et quelques panneaux fermés à clé. Ces derniers ne nous sont pas accessibles en tant qu’élu.e.s.

Que se passe-t-il au sein des commissions municipales?
Nous bénéficions des 6 années où nous avons été en place, et les commissions ont été maintenues, mais avec un seul élu de la minorité par commission. Celles-ci ne fonctionnent pas comme lieu de travail, d’échanges, de débats, mais comme de simples lieux d’informations. Cela n’a rien à voir avec notre conception d’un fonctionnement démocratique !

Contact de l’Écho du Ranc de Banes : collectifrancdebanes@gmail.com
ou sur Facebook : L’Echo du Ranc de Banes

 

Les décisions sont prises entre le maire et les adjoints, et pendant les commissions, on nous présente ces décisions, qui seront validées en conseil municipal. Notre fonctionnement était très différent. Pour nous, avant une commission, l’information doit être envoyée aux élu.e.s. Il faut ensuite, en commission, travailler et préparer les argumentaires, pour et contre le projet, émettre éventuellement un avis si un consensus se dégage, le tout étant ensuite présenté au conseil municipal, assemblée délibérante qui peut débattre et prendre une décision après vote.
Au moment des conseils municipaux, avez-vous une libre expression?
On reçoit par mail l’ordre du jour et les notes d’intention. Il faut envoyer en avance les questions à ajouter à cet ordre du jour. Pendant le conseil, les points sont abordés par le maire, ou un adjoint, puis il y a possibilité d’intervention et de questions, et nous en profitons, même si cela crée des heurts.
À Sumène, 19 personnes constituent le conseil municipal, beaucoup de la majorité sont nouvelles dans cette fonction. Il y a une sorte de passivité dont il faudrait sortir, même s’il n’est pas toujours facile de prendre la parole en public. Nous aimerions que la parole de toutes et tous circule plus librement.

Quels seraient vos souhaits pour l’avenir?
Que les commissions soient des lieux d’échanges pour réfléchir ensemble. La municipalité a bien sûr de bonnes idées, que nous serions prêt.e.s à soutenir et, dans l’idéal, nous voudrions travailler avec la majorité.
L’Écho du Ranc de Banes, périodique créé récemment, veut alimenter le débat citoyen à partir d’autres sources d’information, permettre l’expression libre de tous ceux qui veulent donner leur avis sur l’avenir de Sumène.
Il peut relever les actions positives de la municipalité, en proposer de nouvelles, mais aussi critiquer celles qui lui paraissent néfastes. C’est la base de la démocratie.
Pour nous, c’est l’absence d’information suffisante qui fait naître les rumeurs.